Les six types de questions

Texte inspiré de : http://www.uqtr.ca/accompagnement-recherche
©Louise Lafortune et Sylvie Turcotte. Document 6 : Moyens réflexifs interactifs pour l’accompagnement d’un changement en éducation dans le cadre du projet d’accompagnement-Recherche-Formation pour la mise en œuvre du Programme de formation de l’école québécoise. 2008
https://oraprdnt.uqtr.uquebec.ca/pls/public/docs/GSC1/F1461491823_doc_moyens_23oct8.pdf

La pratique réflexive exige des questions qui stimulent la réflexion afin que les personnes accompagnées en viennent à se questionner elles-mêmes, à s’auto observer et à s’auto évaluer. La pratique réflexive favorise des prises de conscience pour plus de cohérence entre pensées et actions et l’autonomie réflexive interactive des personnes accompagnées. Le questionnement réflexif interactif est un questionnement qui permet de rendre compte de la complexité du processus de la pratique réflexive, mais également de son potentiel réflexif. À cet égard, six types sont recensés : informatif, descriptif, réflexif, métacognitif, affectif et, enfin, conceptuel1 (Lafortune, 2004a). La personne accompagnatrice intègre des questions de différents types dans la planification de la démarche d’accompagnement et les formule en cohérence avec l’intention poursuivie.

1. Les questions de type informatif

Les questions de type informatif mènent la personne interrogée à donner des renseignements à propos d’aspects précis relatifs à ses expériences antérieures (par exemple, le nombre d’années d’expérience dans l’enseignement, les formations déjà reçues…). Les intentions sont alors de:

  • Connaître les personnes auxquelles on s’adresse ou avec lesquelles on travaille.
  • Guider les interventions ou questions futures.

2. Les questions de type descriptif

Elles suscitent la verbalisation de ses pratiques à partir d’une expérience précise, et mènent la personne interrogée à expliciter ou à verbaliser les actions de sa pratique en décrivant une ou des expériences particulières où elle a agi comme personne intervenante ou accompagnatrice. Les intentions sont alors de :

  • Verbaliser le contexte, l’action, la pratique ou l’expérience tentée.
  • Éviter l’évaluation, le jugement et la critique.
  • Encourager l’expression du déroulement temporel de la suite des actions.

3. Les questions de type réflexif

Elles mènent la personne interrogée à réfléchir à sa pratique en essayant de comprendre et d’analyser ce qu’elle pense et ce qu’elle fait. Cette personne réalise une forme d’auto-évaluation ou d’autocritique de ses façons d’agir. Elle tente de dégager ses difficultés et ses facilités, ses cohérences et ses incohérences et surtout, elle tente de se regarder réfléchir sur ses pensées et sa pratique. Les intentions sont alors de :

  • Réfléchir à ses pensées (croyances…) et à sa pratique.
  • Auto évaluer et auto critiquer ses idées et ses actions.
  • Analyser ses façons de faire en lien avec celles des autres.
  • Se regarder réfléchir sur ses pensées et sa pratique.
  • Comprendre ce qui influence ses croyances et ses pratiques.
  • Réfléchir à ses idéaux pédagogiques.

Une question de type réflexive interactive est de type ouvert et n’induit pas de jugement ou de réponses précises.

4. Les questions de type métacognitif

Elles mènent la personne interrogée à porter un regard sur son processus d’apprentissage. Cette personne peut être placée dans une situation d’apprentissage ou de résolution de problèmes ou de réalisation d’une tâche et devoir exprimer à voix haute ce qui se passe dans sa tête afin de partager sa démarche mentale. Elle peut cependant plutôt parler de ce qu’elle fait dans une situation d’apprentissage en se rappelant de cette dernière ou à l’aide d’une mise en situation. Les intentions sont alors de :

  • Porter un regard sur son processus d’apprentissage.
  • Se connaître comme individu métacognitif.
  • Reconnaître sa façon d’apprendre.
  • Verbaliser sa façon d’autoévaluer et de réguler dans l’action.
  • Explorer des façons de faire dans d’autres circonstances.

5. Les questions de type affectif

Elles sont liées aux relations interpersonnelles ou aux craintes et inquiétudes, mais aussi aux plaisirs, et mènent la personne interrogée à faire émerger ses attitudes dans une situation particulière ou fait émerger les aspects affectifs suscités par différentes situations. Ces réactions affectives peuvent dépendre de ses expériences antérieures. Ces réactions peuvent être plutôt individuelles ou être liées aux relations interpersonnelles entretenues avec certains types de personnes. Les intentions sont alors de :

  • Faire émerger les attitudes et les réactions affectives.
  • Explorer ce qui relève de l’individu de ce qui relève des relations interpersonnelles.

6. Les questions de type conceptuel

Elles mènent la personne interrogée à faire émerger (ou activer) ses connaissances, ses perceptions, ses croyances, ses convictions et ses conceptions, mais aussi de discuter sur des éléments théoriques. Cette personne précise ce qu’est, selon elle, un concept ou une pratique. Elle en parle en faisant ressortir les avantages et les inconvénients, les différences et les ressemblances… Les intentions sont alors de :

  • Faire émerger les croyances, connaissances, perceptions, convictions et conceptions.
  • Susciter des comparaisons.
Exemples de questions associées à la pratique réflexive, issues d’un exercice réalisé dans le cadre de la démarche École et Stratégies, et qui peuvent inspirer lors des périodes d’échange
Que se passe-t-il?
Types informatifs et descriptifs
Comment cela se passe (déroulement, circonstances)?
Types informatifs et descriptifs
Pourquoi cela se passe-t-il ainsi (démarche mentale)?
Types réflexif, métacognitif, conceptuel, affectif
Que peut-on améliorer?
Types réflexif, métacognitif, conceptuel, affectif
Questions pour mieux connaître la personne Le comment cela se passe?
— Les circonstances
— Le contexte
— Le déroulement temporel
Pourquoi cela se passe ainsi? Quelle hypothèse faites-vous pour expliquer votre choix de faire ainsi? Quelles questions cette pratique soulève-t-elle?
À quels niveaux se situent ces questions?
Pourquoi interrogez-vous cette façon de faire?
Pourquoi doutez-vous de l’efficacité de cette pratique? À quoi le voyez-vous?
Pourquoi cette façon de faire provoque-t-elle un doute, de l’insatisfaction ou de l’inconfort?
À quoi tient votre intuition qu’il vous fait revoir cette pratique?
Questions pour bien comprendre la pratique dont il est question
Le quoi : la pratique, son contexte?
Le qui elle vise?
Le où cela se passe?
Le quand cela se passe?
  Quels liens faites-vous :
— Avec vos croyances, valeurs?
— Avec vos connaissances?
— Avec vos expériences?
Est-ce cohérent? Est-ce incohérent?
Le fait d’agir ainsi (action achevée) a-t-il une influence sur la suite des choses (l’action à venir)
Si vous maintenez cette pratique, quelles conséquences possibles anticipez-vous à cela?
Quels sont les avantages/désavantages d’agir ainsi?
    Repérez-vous des contradictions entre
— ce que vous dites et faites,
— ce que vous pensez et accomplissez,
— entre la théorie et votre opinion sur le sujet?
Voyez-vous des ajustements, des modifications qui pourraient être apportés à votre pratique?
Voyez-vous des solutions pour réduire votre inconfort?
Qu’est-ce qui pourrait être amélioré dans cette pratique?
Qu’est-ce qui pourrait être expérimenté?
Êtes-vous disposé à le faire?
    Que disent les théories au sujet de cette pratique? Le savez-vous? Le savons-nous? Quels sont les risques de changer votre pratique?
    Faites-vous des liens entre cette façon de faire et certains résultats ou l'absence de résultats dans votre accompagnement…?
Que croyez-vous que provoque cette pratique?
Prenez-vous la décision de changer cette pratique?
Qu’est-ce que vous devez mettre en place pour y arriver?
Comment allez-vous vous assurer que vous êtes sur la bonne voie?
À quoi allez-vous le reconnaître?
De quoi avez-vous besoin pour y arriver?
    Avez-vous toujours agi ainsi (évolution de cette pratique dans le temps)? À quoi vous attendez-vous la prochaine fois que vous serez dans le même contexte?
    Quelle est la part de routine dans cette pratique?
Quelle est la part d’automatismes dans cette pratique?
S’agit-il d’une pratique consciente?
Où se situe votre responsabilité au regard de cette pratique?
    Qu’est-ce qui devient progressivement plus explicite dans cette pratique?  

1. Lafortune, L. avec la collaboration de S. Cyr et B. Massé et la participation de G. Milot et K. Benoît (2004). Travailler en équipe-cycle. Entre collègues d'une école, Québec, Presses de l'Université du Québec.